يد واحده ما تصفق

Yedd ouahda ma tsafek
Une main toute seule ne peut pas applaudir

mardi 10 mai 2011

La guerre d'Algérie dans la chanson française

Pour notre article nous nous sommes intéressées à la guerre d’Algérie dans la chanson française.
Cette période se situe entre 1954 et 1962. Elle a lieu en Algérie mais a aussi des répercussions en France, notamment le 17 Octobre 1961. Beaucoup d’auteurs français ou d’origine maghrébine illustrent par des chansons cette période sanglante.
Nous en avons retenu quelques uns que nous allons vous présenter puis analyser certaines de leur paroles. Chaque auteur expose son opinion de la guerre qu’il l’ai vécu ou non. Cela va finalement nous permettre d’obtenir une vision globale des faits.









Tout d'abord nous allons voir comment les artistes évoquent la guerre qui se déroule sur le territoire de l'Algérie grâce à deux chanteurs de variété française. D'un coté Serge Lama qui partit faire son service militaire en Algérie et de l'autre Jean Pax Méfret qui lui est né là-bas.
En premier lieu, nous pouvons citer Serge Lama avec sa chanson l'Algérie. Serge Lama (de son vrai nom Serge Chauvier) est né le 11 février 1943 à Bordeaux. Il part pour son service militaire vers l’âge de 20 ans en Algérie dans la base d’Hammaguir, en plein désert. Pendant ce temps il écrit ses premières chansons sur l’Algérie et sur la guerre à laquelle il ne voulait pas participer.
Il rentre à Paris en 1963 et enregistre son premier disque en 1964, il aura une carrière de chanteur impressionnante et remporte son premier disque d'or avec « Je suis malade », mais il ne se contente pas de chanter, Serge Lama sera aussi acteur au théâtre, et jouera dans plusieurs films et téléfilms, il écrira aussi une opérette sur Napoléon.
Dans sa chanson l’Algérie, Serge Lama parle du départ des soldats français. Il utilise le champ lexical de la mélancolie, du départ et de la peur. Malgré tout, il nous décrit une Algérie belle qu’il dit « écrasée par l’Azur » puis qu’il qualifie à la fin comme un « beau pays ».


Algérie
Serge Lama

Dans ce port nous étions des milliers de garçons
Nous n’avions pas le cœur à chanter des chansons
L’aurore était légère, il faisait presque beau
C’était la première fois que je prenais le bateau

L’Algérie
Ecrasée par l’azur
C’était une aventure
Dont on ne voulait pas
L’Algérie
Du désert à Blida
C’est là qu’on est parti jouer les p’tits soldats
Aux balcons séchaient draps et serviettes
Comme en Italie
On prenait de vieux trains à banquettes
On était mal assis
L’Algérie
Même avec un fusil
C’était un beau pays
L’Algérie

Ce n’était pas un port à faire du mélo
Et pourtant je vous jure que j’avais le cœur gros
Quand ils ont vu le quai s’éloigner, s’éloigner
Y en a qui n’ont pas pu s’empêcher de pleurer

L’Algérie
Ecrasée par l’azur
C’était une aventure
Dont on ne voulait pas
L’Algérie
Du désert à Blida
C’est là qu’on est parti jouer les p’tits soldats
Nos fiancées nous écrivaient des lettres
Avec des mots menteurs
Le soir on grillait des cigarettes
Afin d’avoir moins peur
L’Algérie
Même avec un fusil
C’était un beau pays
L’Algérie

Un port ce n’est qu’un port, mais dans mes souvenirs
Certains soirs malgré moi je me vois revenir
Sur le pont délavé de ce bateau prison
Quand Alger m’a souri au bout de l’horizon

L’Algérie
Ecrasée par l’azur
C’était une aventure
Dont je ne voulais pas
L’Algérie
Du désert à Blida
C’est là que j’étais parti jouer les p’tits soldats
Un beau jour je raconterai l’histoire
A mes petits enfants
Du voyage où notre seule gloire
C’était d’avoir vingt ans
L’Algérie
Avec ou sans fusil
Ca reste un beau pays
L’Algérie

lien de la chanson

Nous avons aussi comme exemple Jean Pax Méfret. Ce chanteur, compositeur évoque les affrontements de façon beaucoup plus direct dans sa chanson Les Barricades.
Jean Pax Méfret est né en Algérie le 9 septembre 1944. Journaliste, auteur de livre et auteur compositeur interprète de chansons, il est un défenseur de l’Algérie Française. Il a travaillé pour le quotidien d'extrême droite Minute, ainsi qu'au mensuel des rapatriés d’Algérie « France Horizon », puis comme reporter dans le journal « L’Aurore » Ses textes sont toujours très engagés. Il est l'auteur de plusieurs romans dont un récit autobiographique sur les derniers jours de l’Algérie Française (« 1962, l’été du malheur ») .
Son engagement lui vaudra la prison en Algérie et en France: Jean Pax Méfret fut le plus jeune détenu de l’Algérie Française (16 ans)
Compositeur, il est l’auteur de plus de 300 chansons et commence sa carrière en 1964. Ces premières chansons engagées pour l’Amnistie des condamnés et des exilés du combats pour l’Algérie Française paraissent en 1968 avec « L'Hymne des pieds noirs » et « La Prière des pieds noirs » .

Le texte de la chanson Les Barricades est très violent, Jean Pax Méfret utilise des termes très forts qu'il place à la rime pour créer des échos entre les mots,comme « des enfants ont peur »/ « des hommes meurent ».
Cette chanson prend parti pour les pieds noirs, exprime leurs angoisses et évoque la violences des affrontements entre les autorités françaises et le Front de Libération nationale.

Les Barricades
Jean Pax Méfret

Le drapeau taché du sang d'Hernandez,
La foule qui crie "Algérie Française",
Des civils en armes derrière des pavés,
Je suis dans l'enceinte du camp retranché.

Il y a quelques heures une fusillade
A semé la mort chez mes camarades:
Venant du Forum avec leurs fusils
Des gardes casqués ont tiré ici.

Sur cette esplanade
Où des barricades
Se sont élevées.
Flotte le drapeau taché.

Lorsque le FM a craché ses balles,
Les Pieds-Noirs chantaient l'hymne national,
Un homme parlait du haut d'un balcon,
Alger se levait contre l'abandon.

La nuit qui commence sera difficile.
Des hélicoptères survolent la ville,
Où des soldats crient, des enfants ont peur.
Où des femmes prient et des hommes meurent.

Sur cette esplanade
Où des barricades
Se sont élevées,
Pleure le drapeau français.

Lien vers chanson

Les faits
L'Algérie a obtenu son indépendance grâce aux accords d'Evian du 18 mars 1962. Mais avant d'en arriver là, la France et L'Algérie ont dû faire face à de sérieuses crises politiques: guerre civile qui aurait couté la vie de quatre mille personnes, retour de Charles de Gaulle au pouvoir, chute de la IVe République et création de la Ve République. Et ce n'est qu'après avoir tenté d'écraser (sans succès) les indépendantistes algériens que De Gaulle va se pencher vers la solution de l'indépendance, la seule capable de mettre fin au conflit.
Trois points majeurs marquent la sortie de la guerre: la proclamation de l'indépendance de l'Algérie par le Général De Gaulle le 5 juillet 1962, la naissance de la République Algérienne démocratique et populaire le 25 septembre, et l'exode d'environ un million de pieds-noirs.

Petit retour en arrière, Paris, le 17 octobre 1961: une date marquée par de violents affrontements et une répression sanglante d'une manifestation organisée par le FLN. Cela fait suite à une vague d'attentats contre des policiers, qui répondent par des passages à tabac, vols...et c'est le 5 octobre que le préfet Papon instaure un couvre-feu pour les nord-Africains. La réaction ne se fait pas attendre, Zouaoui le responsable parisien du FLN décide d'une action de masse sur trois jours les 17, 18 et 20 octobre. Le 17 octobre, vingt à trente mille algériens se regroupent dans différents points de la capitale, c'est le début d'une soirée tragique. Les premiers coups de feux sont tirés sur le Pont de Neuilly où des manifestants ont été bloqués et durant la nuit des corps seront jetés des ponts de Neuilly, d'Argenteuil et d'Asnières. Sur les grands boulevards où des manifestants ont réussi à se regrouper, les policiers chargent, interpellent et tirent. Dans les boulevards Saint Michel et Saint Germain, les manifestants sont encerclés et frappés par les forces de police...certains choisissent de se jeter du Pont Saint Michel pour échapper aux coups.
Dans cette bataille la principale incertitude est le nombre de morts du côté des manifestants algériens.

Cette soirée sanglante a inspiré plusieurs artistes et parmi eux le rappeur français Médine, et le groupe punk Brigada Flores Magon.
Médine de son vrai nom Médine Zaouiche est un rappeur français havrais d'origine algérienne né en 1983. Il est membre du label indépendant DIN Records et du collectif La Boussole. Il est l'auteur de trois albums solos et de trois albums avec La Boussole. Le rap de Médine se caractérise par sa voix rauque et l'originalité de ses textes qui sont souvent percutant et ne laissent pas indifférent. Il se considère comme le porte voix de toute une génération de jeunes issus de l'immigration et dénonce les amalgames de l'Islam. Lui même musulman, il dénonce les dérives de sa communauté. Médine par ses textes entend faire réfléchir plutôt que d'attiser la haine. Ils sont représentatifs de la religion musulmane. La tolérance, le respect des cultures, l'histoire prennent une place importante dans ses écrits. Il produit des morceaux féministes et d'autres plus engagés. Il soigne son écriture et recours rarement à la vulgarité en vue de rompre avec les clichés pouvant exister sur les musulmans et rappeurs.

Dans cette chanson Médine dénonce l'attitude inhumaine des colonisateurs et la discrimination à laquelle ils sont assujettis. Il parle au nom de son père et raconte le voyage de celui
ci, il décrit aussi très durement les combats entre force de l'ordre et manifestants lors du sanglant 17 octobre 1961. Il nous fais sentir cette violence par le vocabulaire cru et dur. De plus il critique violemment Maurice Papon ainsi que les "incidents de Charonne".






Médine
17 octobre

Alger capitale, au commencement des « sixties »
Les pieds-noirs quittent le navire17 octobre, les colons dératisent
1961, période estivale, c’est la guerre d’Algérie et son festival
Et son lot de discriminations, de tortures, d’exactions tout un ramassis d’ordures
Quelques degrés au Nord de l’équateur
Je quitte l’Algérie française, un pincement dans le coeur
Voici mon parcours Ahmed, fils de Mohamed
Gangrené du corps par la misère du Maghreb
Par les meurtres les soirs de couvre-feu,
Par la peur du soldat français qui ouvre le feu
Ouvre les voiles petit paquebot libérateur
Emmène moi au pays des employeurs
Loin de l’inactivité beur algéroise
Loin de ceux qui transforment nos mosquées en paroisses
Basilique de Notre-Dame d’Afrique
S’éloigne de mon regard lorsque les mouchoirs s’agitent
Verse une larme dans la Méditerranée
Une goutte d’eau dans la mer contient la peine de ma terre damnée.

Accoste à Marseille, port autonome, cité phocéenne,
Un étranger parmi les autochtones
Direction Saint Charles gare ferroviaire
Embarquement quai 7, voiture 6, wagon fourrière
Croise le regard des îlotiers me foudroyant le cœur comme un tir de mortier
Reçoit la flèche de la haine par les appelés du Contingent
"Tes papiers !
- Je suis français missié l’agent "
Chemin de fer, terminus Paris, Gare de Lyon
La métropole et son peuple par millions
Quelques dizaines de francs serrés dans un poing
Serviront de premier contact au café du coin
Moi qui cherchait de la chaleur j’eus le sang glacé
Quand mes yeux rencontrèrent les leurs, couleur iceberg bleuté
Bluffé par leur manque d’hospitalité ainsi sont-ils,
Moralisateurs sans moralité
Démoralisé je reprends le chemin,
Lequel me conduira dans les quartiers maghrébins
Nanterre, monticule de bidonvilles,
Habitation précaire pour mon entrée en vie civile

"Je ne laisserais pas les cœurs du FLN faire la loi dans Paris !
A partir de maintenant, pour un coup reçu … vous en rendrez 10 ! "

Ici, rien de bon pour les ratons,
M’a dit le commissaire sanguinaire de mon canton
Après m’avoir uriné sur les mains, le gardien de la paix casse du cru au quotidien
17eme jour du mois d’octobre, le FLN a décidé de mettre fin a l’opprobre
En effet, le journal de la veille titrait :
"COUVRE-FEU RECOMMANDÉ POUR LES IMMIGRÉS"
Non ! La réaction ne s’est pas faite attendre
Algériens de France dans les rues nous allons descendre
Protester contre leurs lois discriminatoires
Investissons leurs ponts et leurs centres giratoires
Embarqué dans un cortège pacifique,
Nous réclamons justice pour nos droits civiques
Mais la police ne l’entend pas de cette oreille
En cette période nous sommes un tas de rats rebelles
Marchons en direction du pont Saint-michel
Nous verrons bien quelle sera l’issue de cette querelle
Une fois sur la berge j’aperçois le comité d’accueil
Qui souhaite faire de ce pont notre cercueil
Les camps s’observent et se dévisagent
Un silence de mort s’installe entre les deux rivages
Puis une voix se lève, scande " A bas le couvre-feu " et ouvre le feu
La première ligne s’écroule et commence la chasse à l’homme
Je prends mes jambes à mon cou, comme un pur-sang je galope
Mais le pont est cerné, nous sommes bernés
Dans une prison sur pilotis nous sommes enfermés
Pas une, pas deux mais une dizaine de matraques viennent me défoncer le crâne
Et mes os craquent sous mon anorak
Ma bouche s’éclate bien sur les trottoirs
Leurs bouches s’esclaffent bien grandes de nous voir
" Nous allons voir si les rats savent nager
Au fond de la Seine vous ne pourrez plus vous venger "
Inconscient, gisant dans mon propre sang
Les brigadiers en chef par tous les membres me saisissant
Amorcent ma descente là où passent les péniches
S’assurent de ma mort frappant ma tête sur la corniche
Je tombe comme un déchet au vide-ordure
Dans la chute violemment ma nuque a touché la bordure
Liquide poignardant tous mes orifices, le fleuve glacial un bûcher chaud pour mon sacrifice
Monsieur Papon a jugé bon de nous noyer
Aucun pompier pour étouffer le foyer
On n’éteint pas des braises avec un verre de gasoil
Sans penser aux tirailleurs et combattants zouaves
Mon cadavre emporté par le courant
Sera repêché dans les environs de Rouen.

D’étranges nénuphars flottent sur la Seine
Séquence long métrage les yeux plongés dans la seine
Dégât des eaux pour les gens des humans-zoo
Déshumanisés les basanés ne font pas de vieux os

D’étranges nénuphars flottent sur la Seine
Séquence long métrage les yeux plongés dans la seine
Un sceau de pisse dans lequel on noie des rats
Octobre noir, ratonnade sur les boulevards
Ici rien de bon pour les ratons m’a dit le commissaire Maurice Papon
4 mois plus tard on ratonne à Charonne
Les "crouilles" et les "cocos" qui aident les "bougnoules"
132 ans d’occupation française ont servi à remplacer nos cœurs par des braises
Algérie en vert et blanc, étoile et croissant
Devoir de mémoire grandissant.
Jezzaïre.

lien vers la chanson

Enfin, dernière chanson pour cette article: Octobre 61 du groupe Brigada Flores Magon, né dans les années 90 de la rencontre entre la scène alternative des années 80 et sa mouvance anarcho-punk des années 90. Ce groupe de street punk est très engagé dans ses textes, on pourrait le définir d'anarcho-syndicaliste et de profondément antifasciste et antiraciste. Sa formation a varié au fil des années et de l'évolution du groupe mais c'est toujours sous le premier nom que sont parus les quatre albums, nom qui vient de Ricardo Flores Magon précurseur et père spirituel de la révolution mexicaine.
La chanson octobre 61 est particulièrement violente, parue en 2000 dans le premier album éponyme elle évoque la guerre en France comme en Algérie, même si le chanteur n'a pas vécu ces événements, à travers ce « je » il appelle chacun à ne pas oublier. Brigada Flores Magon appelle à ne pas oublier ces événements. Dans ce texte il y a aussi des références très précises par exemple « Charonne » fait référence à la mort de plusieurs personnes dans la station de métro Charonne, une manifestation avait été organisée le 8 février 1962 et fut sévèrement réprimée sur l'ordre du préfet Papon, les manifestants avaient tentés de se réfugier dans la bouche de métro: huit sont morts étouffés et un neuvième n'a pas survécu à ses blessures.


OCTOBRE 61
Brigada Flores Magon

Je me souviens des drapeaux algériens
Dans le maquis luttant contre l'occupant.
Je me souviens, à Alger, à Oran
Les résistants abattus comme des chiens.
Les hommes de l'ombre criaient indépendance.
Les femmes de l'ombre criaient indépendance.

Octobre 61
Octobre rouge, Octobre noir.

Je me souviens, il pleuvait sur Paris.
Des visages durcis marchaient pour l'Algérie.
Qui a vu les corps flotter dans la Seine ?
Nuit des longs couteaux, vive le FLN !
Ils ont lâché leurs chiens, charognes !
Martyrs algériens, Charonne !

Aujourd'hui, il ne pleut plus sur Paris.
17/10/61











Après cette étude, nous pouvons observer que la place de l'Algérie dans la chanson française dépend du vécu et des opinions des auteurs. Chacun d'entre eux fait passer le message qu'il souhaite (ex : pour ou contre l'Algérie française) avec la même violence dans les paroles.




Article écrit par Marie-Alix, Bérengère et Elise

















6 commentaires:

  1. Merci, ça m'a bien aidé :)

    RépondreSupprimer
  2. Le "chant des Africains" est aussi une chanson chantée avant la guerre d'Algérie mais durant la Guerre d'Algérie elle servait de chant "porte drapeau" de signe d'identification pour les Européens

    Très bon travail, félicitations les jeunes pour la compilation.

    RépondreSupprimer
  3. Très bon travail,
    Merci beaucoup!!

    RépondreSupprimer
  4. Très instructif !! cela m'a bien aidé dans mes recherches en tant que retraité passionné de la guerre d'Algérie
    amitiés Claude

    RépondreSupprimer
  5. wsh supr génial vot site çama tro appri des trucs
    bisous mggle

    RépondreSupprimer
  6. Je rappelle que les commentaires sont libres mais peuvent être supprimés si leur contenu est jugé insultant ou ne respectant pas la charte de ce blog.

    RépondreSupprimer